

Bruno Girveau

« Placer le visiteur au centre » des enjeux, des réflexions, de la redéfinition de ce que doit être le musée de demain, et « lui offrir une expérience unique dans le musée ». L’ambition de Bruno Girveau pour le Palais des Beaux-Arts de Lille ouvre la voie à l’expérimentation. Il s’agit de désacraliser le musée pour en renouveler la fréquentation, et en faire un lieu de vie à part entière.

À son arrivée à la tête du Palais des Beaux-Arts de Lille en 2013, après avoir été conservateur au musée d’Orsay et chef du département du développement scientifique et culturel de l’Ecole nationale supérieure des beaux-arts, Bruno Girveau a fixé à ses équipes une feuille de route en phase directe avec les attentes des amoureux des musées, mais aussi celles des amateurs qui s’ignorent encore. Les plus jeunes, et ceux qui hésitent encore à pousser la porte d’institutions culturelles impressionnantes. Pour susciter « l’envie de musée », faire venir et revenir de nouveaux visiteurs, Bruno Girveau a repensé l’idée même de musée.
« Aujourd’hui, on peut trouver les œuvres en ligne, alors qu’est-ce qui justifie encore que les gens se déplacent pour aller au musée ? On sait de plus en plus que le fait de déambuler dans le musée, d’être confronté à l’œuvre peut procurer du bien-être, des émotions, du plaisir. Des études scientifiques commencent à l’attester. Ce sont probablement les pistes du musée de demain : offrir d’autres occasions de découvrir les œuvres qui ne font pas nécessairement appel à votre intelligence, mais à vos sens, vos émotions. » Médiation, yoga, Qi Gong : en marge de la visite des collections et des expositions temporaires, les bienfaits conjugués de l’attention portée au corps et à l’esprit attirent de plus en plus d’adeptes. Ainsi, chaque séance proposée en soirée par le musée rencontre un franc succès. « C’est une expérience spirituelle et physique complètement différente de la visite traditionnelle du musée. »



Le musée de demain ? Un lieu de vie où l'on se sent bien.
Terrain de jeu central de ces ateliers « bien-être », l’Atrium du Palais des Beaux-Arts a repris depuis 2017 son rôle central de réception et de convivialité, comme au temps de la Rome antique. La librairie et le café ont été repensés, et accueillent aujourd’hui, outre les visiteurs du musée, des réunions d’entreprises. Des salons y ont été installés, avec accès gratuit au wifi haut-débit et à des espaces d’exploration numérique des collections. « Cet endroit est devenu un lieu de vie. On peut même y croiser des gens qui font la sieste ! », se réjouit Bruno Girveau. « Pour une longue visite au musée, il faut que l’on puisse se poser dans un endroit, lire un livre, se connecter. Tout simplement, qu’on puisse être bien. Cet atrium est le premier maillon d’une chaîne que nous allons construire pour créer, d’ici quelques années, un musée entièrement dédié à l’expérience de visite. »






Le Palais des Beaux-Arts propose en outre depuis plusieurs années des ateliers d’art-thérapie le samedi matin, partant du principe que « l’activité artistique est comme un terrain d’entraînement de la vraie vie ». « Dans la vie comme sur une feuille de papier, il peut y avoir de petits incidents, explique Pascaline Bonnave, art-thérapeute, peintre et plasticienne. Qu’en fait-on ? Comment se sert-on de sa créativité pour avancer, transformer son dessin et se transformer, s’assouplir, lâcher prise… J’enveloppe les participants dans une bulle de bien-être et les encourage à faire quelque chose dont ils seront fiers afin qu’ils repartent ressourcés. »
Offrir à des artistes contemporains la possibilité de réinventer les œuvres du musée pour y attirer des publics nouveaux.
Le Palais des Beaux-Arts de Lille se sert en outre d’événements comme de « laboratoires pour explorer des pistes ». L’idée force : créer des événements atypiques qui s’adressent à un public plus large que le public habituel et qui permettent une mise en lumière des collections permanentes, un peu oubliées. Avec l’Open Museum, « nous invitons des personnalités décalées à venir dialoguer avec le musée ». L’artiste invité a carte blanche dans le musée, pourvu qu’il engage un dialogue avec les œuvres déjà présentes. Cela donne des rencontres plutôt inattendues. Après le groupe de musique rock-électro AIR (2014), le collectif allemand Inter Duck et son personnage de Donald (2015), l’auteur de bande dessinée Zep (2016) ou encore le chef étoilé Alain Passard (2017), le musée lillois invite en 2020 Alexandre Bloch, directeur musical de l’Orchestre National de Lille (ONL) pour une nouvelle expérience de sound design éclectique (jazz, classique, rock, pop et rap).

D’octobre 2020 à février 2021, le public sera invité à une expérience sensorielle et inédite de la sculpture. Aux antipodes des pratiques habituelles, l’exposition « Prière de toucher » vous encouragera à toucher des reproductions d’œuvres sur le thème de la figure humaine, de l’Antiquité à nos jours.